Ce soir, je me demande où est passé la notion de solidarité dans notre société.
Il y a une dizaine de jour, j'ai pris un TER de la ligne Toulouse-Auch. A la station Arènes, le conducteur du train a bloqué les portes pour qu'un couple avec 2 chiens ne montent pas dans le train. J'étais choquée et en colère.
Ces chiens étaient cools, bien sociabilisés, muselière autour du coup.
Le train quasiment vide, un 27 décembre.
Si je me laisse aller à un jugement un peu hâtif, j'ai eu l'impression que ce couple pouvait ne pas avoir mangé à sa faim depuis quelques jours, peut-être avoir dormi dans la rue.
Peut-être que monter dans ce train leur aurait permis d'aller passer un moment avec des gens aimés, leur aurait facilité la vie, tout simplement.
Mais non.
Pas de dialogue, porte bloquée.
Ce midi, même train, sens opposé.
La contrôleuse verbalise un jeune qui parle très mal français, qui lui dit qu'il a oublié sa carte de séjour à la maison. Son ton à elle est narquois, insupportable.
Juste avant l'arrivée en gare, elle déverrouille la porte des toilettes (aprés sommation, mais honnêtement, avec l’épidémie de gastro en court, si tu étais en train de te vider, tu n'avais pas le temps de réagir). 2 jeunes en sortent, ils n'ont pas de titre de transport.
Et là, elle leur dit "Riez bien, vous verrez que la roue tourne toujours".
Ça m'a scotché.
A quel moment elle ne se dit pas qu'ils sont du bon côté de la roue là, qu'ils ont déjà vu l'autre côté?
A quel moment quand, tu verbalises un jeune qui parle "mal" français, en lui demandant de t'épeler son nom alors que visiblement il ne peux pas le faire et ne comprends pas ce que tu lui demandes...à quel moment tu ne te dis pas que ce jeune là a sûrement déjà vécu bien plus d'horreur qu'avec nos petites gueules de blanche on ne verra jamais?
A quel moment on oublie nos privilèges?
A quel moment on perd notre humanité?
Il y a tellement de schémas et de concepts complètement déconnants institutionnalisés dans notre société capitaliste patriarchale blanche (tiens, d’ailleurs, je suis en train de lire Le droit du Sol, d’Etienne DAVODEAU, je te recommande!).
Parfois, je me sens vraiment découragée, en colère.
Quelques minutes plus tard, j’écoutais un podcast très intéressant sur la culpabilité…et en écrivant cet article, je me rends compte que je me sens coupable de ne pas avoir réagis.
De ne pas avoir dit à cette contrôleuse de réfléchir à ce qu’elle venait de dire, que son ton était insupportable. Je me suis tue alors que j’ai eu envie de parler, mais je n’ai pas osé, je suis complice, je participe au mouvement.
C’est pas super confort hein, de voir son côté un peu dégueu, de regarder en face quand on déconne. Pourtant, c’est comme ça, c’est en me souvenant de ce moment que la prochaine fois, j’oserai (peut-être) ouvrir ma gueule en direct.
Et tu sais quoi d’ailleurs? Pour en revenir au sujet de l’énergie dont je te parlais dans ma dernière lettre (re-d’ailleurs, on commence la semaine prochaine si tu as envie d’explorer et retrouver ton énergie) ce genre de moments où je n’assume pas qui je suis, mes convictions. Ces moments où je tais qui je suis, mes valeurs, participent grandement à me “bouffer” mon énergie, parce que je ne suis pas alignée dans ces moments là.
Voilà mes pensées du soir.
Je t’envoie de la douceur.